Rencontre avec Christopher Gibert, compositeur

Originaire de Rocamadour, ce jeune organiste, chef de chœur et compositeur s’est produit l’été dernier dans le cadre du festival avec son chœur de chambre Dulci Jubilo. Il reviendra lors de la saison 2022 pour une commande du 45e Festival.

A 28 ans, votre vie musicale est déjà bien remplie. Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?

Organiste à l’origine, j’ai étudié au conservatoire et à l’université en parallèle, aboutissant à un Master, un Diplôme d’Etat de professeur de musique, une licence d’interprète (DNSPM), un Prix d’analyse et un Prix de direction. J’ai eu la chance de croiser durant mes études des pédagogues inspirants qui m’ont construit et donné le goût du beau, la curiosité d’aller chercher une interprétation profonde et vraie. Je pense à Régine Théodoresco, Agnès Brosset, Gildas Pungier, Naji Hakim, Michel Bouvard, Rolandas Muleïka et tant d’autres professeurs bienveillants et passionnants.
J’ai fondé durant mes études le chœur Dulci Jubilo, devenu quelques années après un chœur de chambre professionnel. Mais je continue ce projet avec la même idée initiale : des artistes qui offrent leur talent à la musique, qui ont plaisir à partager leur passion du métier, et plaisir à se retrouver. Je porte une particulière attention à associer les voix de chacun en cohérence avec le répertoire abordé.

Christopher Gibert, Sylvanès 2021, © Marie Lamour

Comment êtes-vous arrivés à la composition ?
Par curiosité, envie d’expérimentation et par besoin de dire des choses grâce à la musique. Je n’ai pas suivi d’études supérieures en composition. J’ai en revanche fait mes classes d’écriture et de styles. Ma soif intarissable de découverte de répertoire, sans cesse à étudier, digérer, analyser, et les conseils amicaux de Naji Hakim, Patrick Burgan ou Thierry Escaich ont fait le reste.
En fait, je me conforme assez peu au modèle français du compositeur, qui dans la plupart des cas réalise des études spécialisées pour en faire son métier. Pour chercher une filiation, je me sens plus proche -par ma spécificité pour la composition chorale- de la lignée des organistes et chefs de chœurs anglais qui parallèlement à cela sont souvent des compositeurs très prolifiques.

A quand remonte votre première venue à Sylvanès ?
J’y suis venu, il y a quelques années chanter un Te Deum de Charpentier avec Antiphona, dirigé par Rolandas Muleïka. J’avais été séduit par ce lieu, assez isolé mais si vivant. Plus récemment, j’ai pu y passer quelques jours lors d’une résidence et j’ai été profondément touché par l’atmosphère positive et le calme de l’abbaye. C’est un lieu idéal pour s’épanouir artistiquement.

Comment avez-vous vécu votre concert donné cet été au festival ?
Un grand moment d’émotion, de communion avec les chanteurs, Thomas (l’organiste) et le public. Sylvanès est un lieu où l’on nous donne le temps de travailler, où l’accueil est serein et bienveillant. Toute l’équipe était ravie de ce moment, très intense ! Avec Thomas Ospital, nous avons aussi savouré ce moment en ayant le temps de travailler ensemble la veille, les choix de registrations de l’orgue.

Concert « Reflets croisés », août 2021, Festival de l’Abbaye de Sylvanès

Cela joue sur la subtilité du rapport entre l’instrument et le choeur. Souvent dans les festivals, les répétitions sont au lance pierre et ce temps là est très réduit voire inexistant. Nous nous faisons confiance, mais le travail est moins abouti avec autant de sérénité et d’assurance dans les équilibres.

Quelques mots sur votre projet de composition « Ode à l’Enfant Lumière » qui sera créé au festival le 7 août 2022 ?
Tout d’abord, je tiens à remercier Michel Wolkowitsky pour la confiance qu’il m’accorde dans la commande de cette oeuvre. « Ode à l’enfant lumière » est une cantate spirituelle dont le fil conducteur sont les textes lumineux de la messe de requiem. Ils sont mis en regard avec des poèmes, des textes hébreux et orthodoxes.
Mon idée est de construire à partir de cette source littéraire très riche un discours musical qui parle d’abord au coeur et à l’âme. Le choeur sera soutenu par l’orgue, un percussionniste et une harpe. Il y aura deux solistes, une voix de femme (soprano) et une voix d’enfant, plus fragile, plus pure encore. Cette fresque aux nombreuses couleurs de lumière sera mise en regard avec le fameux Requiem de Fauré, magnifique « berceuse de la mort » aux si tendres lignes et harmonies. Malgré la thématique aux apprêts tristes, je gage que ce programme et cette création seront marqués par l’espoir, la quiétude, la confiance et l’espérance.