Rencontre avec la compositrice et chanteuse Cécile Veyrat

Rencontre avec Cécile Veyrat, artiste et compositrice aux commandes du projet La Belle et le Loup, opéra pop jeune public qui sera donné à Saint-Affrique le mercredi 30 avril 2025 à 20h30. 

Peux-tu te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas ?
Je suis musicienne sous plusieurs facettes : pianiste, chanteuse, accordéoniste, compositrice et cheffe de chœur. Mon parcours est varié, j’exerce plusieurs métiers en lien avec la musique qui me permettent d’en vivre pleinement. Ma passion pour la musique est née très tôt, j’ai commencé le piano à sept ans et j’ai tout de suite su que je voulais en faire mon métier. Au départ, je m’orientais vers l’enseignement, mais j’ai finalement pris le chemin du spectacle.

 

Pourquoi composes-tu pour le jeune public ?
J’ai toujours travaillé avec des enfants, j’ai débuté en enseignant le piano et la transmission a toujours été importante pour moi. Le hasard des rencontres a aussi joué un rôle clé dans mon choix artistique. Par exemple, avec la conteuse Aimée de la Salle, j’ai travaillé sur des spectacles pour le très jeune public. En ce qui concerne le spectacle avec chœur d’enfants ; on m’a proposé de créer un spectacle chanté avec des enfants en collaboration avec la Scène de musiques actuelles (Smac Paloma) à Nîmes et je me suis dit : « Pourquoi ne pas créer un vrai spectacle où les enfants pourraient chanter sur scène avec nous (les artistes) pendant le spectacle ? »
C’est ainsi que je suis entrée dans l’univers du spectacle musical pour le jeune public.

 

2025  : c’est la troisième édition de La Belle et le Loup, après une année de pause. Est-ce que la motivation est toujours intacte ?
Oui, totalement ! Même après une pause, c’est comme retrouver un ami. Replonger dans cet univers, redécouvrir les chansons que j’ai moi-même composées, retrouver toute l’équipe, c’est un vrai bonheur. Ce projet est avant tout une aventure artistique exceptionnelle, et l’envie reste intacte.

 

Que peux-tu nous dire sur l’univers qui a inspiré La Belle et le Loup ?
C’est un spectacle qui s’adresse autant aux enfants qu’aux adultes. Marie-Chloé Pujol-Mohatta a écrit un texte qui permet une double lecture : d’abord un conte magique et féerique inspiré de La Belle et la Bête, et ensuite un message plus profond sur notre relation à la nature. Le spectacle aborde des thématiques actuelles comme le climat et l’importance de protéger notre environnement.

Comment se passent les ateliers avec les élèves de l’ensemble scolaire Saint-Michel de Belmont-sur-Rance cette année ?
Les ateliers se passent très bien ! Les enfants de Belmont chantent remarquablement bien. On sent qu’ils sont habitués à des projets musicaux, notamment grâce aux projets « l’École de l’Oralité » et « Chorale à l’École » portés par l’Abbaye de Sylvanès pendant quatre années consécutives dans l’établissement. Leur engagement et leurs belles voix rendent le projet encore plus enthousiasmant.
Cette année est particulièrement importante car nous enregistrons l’album du spectacle. Les musiciens ont déjà posé leurs parties instrumentales, la plupart des chanteurs professionnels ont enregistré leurs voix et nous programmons d’enregistrer les chœurs en avril avec les enfants de Belmont-sur-Rance. Cet enregistrement va donner une nouvelle dimension au projet, en prolongeant son existence au-delà des différentes représentations !

Que souhaites-tu transmettre aux enfants à travers ce projet ?
Je veux avant tout qu’ils prennent du plaisir à chanter. Chanter, c’est à la fois un plaisir et un bienfait. Bien sûr, cela demande du travail et de la concentration, mais le résultat final – un spectacle réalisé ensemble – vaut largement le coup ! J’aimerais ainsi leur donner déjà le goût du spectacle et du chant.

 

En mai 2025, tu seras aussi en résidence à Sylvanès pour un tout autre projet. Peux-tu nous en parler ?
En effet, je serai en résidence d’écriture et de composition musicale à l’abbaye pour mon prochain spectacle intitulé « Eurydice ». Avec ce projet, je reviens au spectacle pour adultes et au « seule en scène ».  J’y allie le conte traditionnel (le mythe d’Orphée) et la chanson pour donner une voix à Eurydice, cette femme singulière, moins entendue que celle de son compagnon légendaire… ce sera  un spectacle à la fois poétique et philosophique !

 

Et pour terminer, une petite question bonus : actuellement, quelle collaboration de rêve te ferait sauter de joie ?
Ahhhhh (rires)… alors, il y a deux artistes de musiques actuelles dont j’apprécie le talent et que j’admire beaucoup. Ce sont les chanteuses Camille et Clara Ysé. J’adore leurs voix et leurs univers respectifs ! Alors, collaborer avec elles, ce serait un rêve oui !

Retrouvez Cécile et l’équipe artistique de « La Belle et le Loup » le mercredi 30 avril à Saint-Affrique pour deux représentations
une à 14h30 pour les scolaires et une à 20h30 pour le tout public.

EN SAVOIR PLUS SUR LE SPECTACLE

BILLETTERIE DU SPECTACLE

Elène Golgevit : la musique comme une évidence

Elène Golgevit enseigne actuellement le chant au CNSMD de Paris. Elle-même chanteuse, elle a été et demeure la coach vocal de quelques stars du lyrique d’aujourd’hui et de demain. Sollicitée partout en France comme à l’étranger, elle encadre depuis 2010 à Sylvanès des classes de maître à destination de chanteurs professionnels. Rencontre…

De quand date votre passion pour la musique ?
Je suis tombée dedans petite. D’abord avec mes parents (une mère pianiste et un père violoniste – tous deux chefs de chœurs) mais aussi mes grands-parents paternels chez qui la musique populaire et savante était très présente. Ils aimaient le chant au même titre que la poésie, la littérature, le théâtre, cela faisait partie de leur quotidien. À plusieurs moments, j’ai voulu prendre pleins d’autres directions professionnelles et j’ai toujours été rattrapée par la musique : elle s’est imposée à moi comme une évidence. C’était vital, comme inscrit dans mes gènes.

Où vous êtes-vous formée ?
Au conservatoire de Montpellier en premier lieu, puis je suis partie en Italie me perfectionner auprès du maestro Roberto Caverni. Ce fut une rencontre décisive pour moi : j’ai découvert ce lien fort à la culture opératique. Là-bas, l’image du maçon qui chante les airs d’opéras, ce n’est pas une légende. Je l’ai vécu… l’opéra c’est dans leur ADN. J’ai réalisé alors que ce n’était pas un monde inaccessible et j’ai choisi d’y faire mon parcours de vie, épaulée par Roberto puis d’autres pédagogues. J’ai bénéficié du soutien majeur du phoniatre Benoît Amy de la Bretèque qui m’a permis d’allier à la fois un savoir de la tradition et de la science.

Quelle est pour vous la principale qualité pour être un bon coach vocal ?
Être à l’écoute de l’artiste et de tous les écueils qu’il peut rencontrer, guider avec exigence et humilité.

La promotion « Sylvanès 2024 » de la classe de maître

Nombreux sont les jeunes talents que vous avez coachés… Quel est votre regard sur leurs carrières, les suivez-vous toujours?
C’est très gentil à vous, je les suis toujours en effet, de plus ou moins près selon leurs demandes. Je suis très admirative des singularités de leurs parcours, des sacrifices qu’ils font pour faire ce métier impitoyable. J’ai un grand respect et une grande tendresse pour eux.

Quel rapport avez-vous avec Sylvanès ?
Il est unique. C’est un lieu calme et puissant qui permet de s’immerger totalement, se ressourcer avec le lieu et la nature, être ainsi dans un cocon de travail bienveillant pour aller au plus loin de son exigence. Les chanteurs aiment venir ici, c’est une bulle d’oxygène au milieu de leurs carrières tellement mouvementées par nature. Ces stages sont une occasion de faire le point sur l’évolution de leur instrument-voix et expérimenter de nouveaux rôles. Le lieu épouse totalement cette intimité tout en étant ouvert sur la nature, comme l’artiste l’est sur scène.

Elène Golgevit et sa pianiste Charlotte Bonneu lors du récital « Verdi, Puccini & Intermezzi » du 26 juillet 2024 au Festival

Quel est votre répertoire d’opéra de prédilection ?
Il est vrai que j’ai une sensibilité pour le répertoire d’opéra italien du XIXe siècle comme vous l’avez entendu cet été dans le récital que nous avons donné avec Charlotte Bonneu dans le cadre du festival de l’abbaye. Mais je suis très sensible à George Benjamin, Kaija Saariaho tout comme à Strauss, Massenet… Au delà de l’opéra, je suis gourmande de musique de manière générale sous de nombreuses formes musicales, vocales ou non, de Bach à Mahler, Britten… et nous avons la grande chance en ce moment de découvrir tant de compositrices méconnues.

 

Interview réalisé avec la collaboration de Rachel Gonzales, bénévole au service communication du Festival 2024

 

 

En savoir plus sur la classe de maître 2025 à Sylvanès

 


CE QU’ELLES DISENT DE LEUR PROFESSEUR… 

Elène est un soleil : elle réchauffe les cœurs et permet de faire rayonner notre voix et notre corps tout entier, elle sait mettre en lumière nos voix et nos personnalités artistiques. Elle nous guide dans le chemin de la carrière, elle sait être aussi la tête froide quand le cœur est trop chaud… Sans elle, mon parcours aurait été complètement différent.
Je suis pleine de gratitude pour elle.
Marine Chagnon

Cela fait 13 ans que je travaille avec Elène et je continue toujours d’apprendre à ses côtés. Elle est à l’écoute de chacun de ses élèves et sait s’y adapter. Parce qu’elle a une boîte à outils sans fond pour régler chaque problème qui pourrait se poser, je l’ai longtemps appelée « ma baguette magique ».
C’est aussi une immense pédagogue, une musicienne et une personne incroyable, d’une curiosité et d’une générosité sans limite qui évolue dans sa pratique et dans sa pédagogie encore et toujours. Pour toutes ces raisons, je me suis rendue compte qu’elle était en fait « ma fée » !

Eva Zaïcik

Elène Golgevit est un modèle de bienveillance, d’écoute et de pédagogie. Toujours disponible, dans le respect de l’artiste et de l’élève, elle parvient à instaurer une relation de confiance et à créer un environnement de travail unique pour des résultats toujours concrets. C’est une professeur rare et exceptionnelle.
Anthea Pichanick

Parmi les élèves de la classe de maître 2023 : Marine Chagnon, Eva Zaïcik et Anthea Pichanick

Rencontre avec Pinky, artiste pluridisciplinaire

Htet Myo Htut Aung, de son nom d’artiste Pinky est une jeune artiste birmane de 32 ans. Autodidacte et issue d’une famille de musiciens, cette artiste pluridisciplinaire exerce dans le domaine des arts visuels (dessin, peinture, design) et de la musique (composition et interprétation).
Suite au coup d’État de l’armée birmane en février 2021, elle a dû fuir son propre pays et a rejoint la France pour repenser son avenir et réaliser son potentiel artistique en sécurité. Pinky a pu étudier pendant un an à l’IESA (Institut d’Etudes supérieures des Arts), année au cours de laquelle elle a longuement développé et mûri son projet artistique. C’est dans le cadre du programme Nora mis en place par l’ACCR que l’Abbaye de Sylvanès l’a accueillie en résidence artistique du 19 août au 1er septembre.
Voici quelques morceaux choisis de son rapport de résidence rédigé à l’issue de son séjour parmi nous.

Sylvanès, ça en vaut la peine !
Se rendre à l’abbaye était aussi difficile que cela en avait l’air sur la carte : 10 heures de voyage au total – mais au fond de moi, je savais que cela en vaudrait la peine. Dès ce premier jour, j’étais ravie d’entendre différents types de musique, les sons de la nature, la forêt et le ruisseau à proximité et d’être dans un lieu historique. Pour quelqu’un comme moi qui puise son inspiration principalement dans la spiritualité, Sylvanès était vraiment un appel.

Sylvanès, un lieu où les différentes religions et les cultures se rencontrent
Ma première semaine de résidence, j’ai pu participer au stage encadrée par Françoise Atlan sur les chants séfarades et arabo-andalous. Je suis fasciné par la culture andalouse depuis que je l’ai découverte à travers la musique en 2018, donc c’était l’occasion parfaite pour moi ! Je me suis fait de nouveaux amis au sein de ce stage.
De nombreux concerts du Festival ont eu lieu pendant mon séjour : un quatuor à cordes talentueux, des polyphonies au féminin d’Occitanie, d’Italie et de Corse, des chants orthodoxes, des chants d’Orient, un récital de chant lyrique et de la musique du Rajasthan. Ici, j’ai l’impression de rêver. C’est si rare d’entendre des musiques de différents religions et pays, de styles divers au même endroit en même temps ! Ce lieu est incroyablement important pour le monde, et j’admire l’équipe, notamment Michel, pour avoir su le maintenir toutes ces années. J’espère que cela continuera encore longtemps !

Un coup de cœur pour l’Orgue de Sylvanès
L’orgue m’a toujours fasciné, car il n’existe pas au Myanmar (ex Birmanie), et j’ai grandi en rêvant de l’entendre en direct, surtout en écoutant beaucoup de Bach. 
J’ai déjà eu l’occasion de jouer cette année sur un orgue d’église et de comprendre son mécanisme. Ici, à Sylvanès, j’ai vraiment apprécié de passer beaucoup plus de temps à jouer et à explorer cet instrument moderne. Certains jours, j’avais l’impression de passer toute la journée à l’intérieur, bien que je ne faisais en réalité que m’entraîner et m’amuser. Un habitant de Sylvanès qui est organiste m’a montré l’utilité des différents registres et claviers, m’expliquant les harmoniques et les sons de résonance.

Sylvanès, un lieu inspirant
Ici, j’ai beaucoup joué du piano, composé des mélodies et une nouvelle pièce sur l’orgue. Malgré mon parcours en musique électroacoustique, je me suis à peine servi de mes instruments électroniques. Les compositions que j’ai créées ici ont été fortement influencées par la musique baroque, loin des styles contemporains. J’ai accepté cette inspiration divine et je me suis permis de créer sans objectif spécifique.
Avant de venir ici, mon rêve  ici était de réaliser mes installations dans des espaces sacrés tels que des églises ou de grandes salles, car je considère que cela correspond parfaitement au concept spirituel qui sous-tend ma pratique. L’idée était de mettre en place une installation immersive, fusionnant la peinture, le son et la musique. Le public pourrait toucher mes peintures, et grâce aux capteurs, leurs touchers manipuleront différents sons, comme si les nuages sur mes peintures chantaient à leurs touchers.
Cependant, durant cette résidence, j’ai saisi l’opportunité d’être attentif et de laisser l’inspiration venir lentement. J’ai décidé de ne pas me fixer d’objectif précis, ce sera pour une autre fois lors d’un prochain séjour à l’abbaye de Sylvanès, je l’espère!

Un séjour magique et guérisseur
En tant qu’exilée, je n’ai pas eu l’occasion de traiter correctement mes traumatismes, de réfléchir à mes progrès ou simplement d’être seule avec mes pensées et mes désirs. Cette résidence, ainsi que celle que j’ai faite en mai, m’a donné du courage et du calme. Les choses restent incertaines, instables, et dangereuses chez moi, avec des mauvaises nouvelles constantes, mais j’ai cessé de vivre dans la peur et le désespoir. Pour cela, je suis profondément reconnaissante de ce que la vie m’offre ici.
Ce que je retiens, ce sont les connexions que j’ai nouées avec toutes les personnes que j’ai croisées, l’histoire passionnante de l’abbaye, son fameux orgue contemporain (le plus grand d’Occitanie), ainsi que les morceaux de musique que j’ai pu composer en ces murs.

 

« Les nuages sont des pensées : exploration des désirs et des prières.
Enfant, j’ai toujours été fasciné par les nuages. Je passais beaucoup de temps à les regarder, alors qu’ils changent de forme, ressemblant parfois à une certaine forme.
Au même moment, des milliers de pensées ont déjà traversé mon esprit. Les nuages sont comme mes pensées, ils ne cessent de passer et se transforment sans cesse. »
Pinky

Site internet de Pinky  : https://pinkyhtutaung.wixsite.com/my-site

L’adieu à André Gouzes (1943-2024)

Notre cher frère André Gouzes nous a quittés dans la nuit du 22 au 23 août dernier nous laissant tous dans une profonde tristesse.

A l’annonce de son décès, des centaines de témoignages, de messages ont afflué par courrier, mail, réseaux sociaux. Nous remercions sincèrement ici toutes les personnes qui ont témoigné leur soutien et se sont associés à notre immense peine.

Ses obsèques ont été célébrées dans l’abbatiale de Sylvanès le mardi 27 août 2024 où la grande famille de Sylvanès s’est réunie en nombre pour lui rendre un dernier hommage.
Ce fut une très belle messe présidée par le Frère dominicain Joël Boudaroua entouré de nombreux frères du Couvent des Dominicains de Toulouse et de Montpellier. Beaucoup de ses ami(e)s chanteurs(es) de toutes les générations étaient également rassemblés pour chanter sa belle Liturgie en présence du frère Daniel Bourgeois co-auteur des textes de « La Liturgie chorale du Peuple de Dieu » avec le frère Jean-Philippe Revel.

TÉLÉCHARGER LE LIVRET DE LA MESSE DES OBSÈQUES

Un temps fort de la célébration a été marqué par la diffusion d’un enregistrement d’une homélie du Père André Gouzes donnée le 27 novembre 1983 en l’abbatiale de Sylvanès. Le moment où la voix si familière d’André a retenti sous les voûtes de l’abbatiale fut chargé en émotions fortes . Il est possible de l’écouter sur le lien ci-dessous :

Beaucoup de fidèles amis, membres adhérents de l’association de l’Abbaye, venus des quatre coins de France, d’Europe, du Canada étaient réunis ce jour là pour ce dernier adieu et de vibrants hommages lui ont été rendus :

• Son ami musicien de longue date, Marcel Bardon a interprété au violoncelle dans le choeur de l’abbatiale la magnifique chanson catalane El Cant dels ocells (Le chant des oiseaux) de Pablo Casals : sublime message de paix et d’espoir…

• Son ami journaliste René Poujol a livré un poignant message d’amitié que vous pouvez retrouver sur son blog en cliquant ici  :  Texte de René Poujol

• A sa suite, c’est Michel Wolkowitsky, son compagnon de route de l’Aventure de la Renaissance de l’abbaye, qui a pris la parole pour lui adresser un émouvant dernier adieu : Télécharger le texte de Michel Wolkowitsky

Le cercueil d’André a quitté l’abbatiale au chant du Salve Regina des bergers du Rouergue jusqu’au parvis de l’abbatiale où l’assistance l’a spontanément applaudi. Ses proches l’ont par la suite accompagné en procession jusqu’au petit cimetière de Sylvanès.

Notre cher André nous laisse un héritage spirituel et musical qui continuera à vivre en chacun de nous et notre reconnaissance est éternelle. Il a désormais retrouvé sa terre du sud Aveyron et repose au chevet de son abbaye, si chère à son cœur et qui demeurera toujours le berceau et le rayonnement de sa création. Merci André et repose en paix !

 

Lire les articles du Progrès Saint-Affricain et du Saint Affricain

 

 

Article du journal Le Progrès Saint-Affricain – paru le jeudi 29 août 2024

 

Article du journal Le Saint-Affricain – paru le 4 septembre 2024

 

 

 

 

 

Nataliia : la joie de chanter ensemble !

Dans le cadre du programme Odyssée de l’ACCR – Association des Centres culturels de rencontre – nous avons eu l’immense plaisir d’accueillir en nos murs Nataliia Zhuravel, artiste ukrainienne pour une résidence du 2 au 15 juillet 2024.
Au cours de son séjour, Nataliia a eu l’opportunité de faire de nombreuses rencontres artistiques, d’animer des ateliers de chant auprès de jeunes enfants, adolescents et adultes et a su transmettre avec un grand enthousiasme son amour de la musique et du chant.  Elle a pu aussi assister au concert d’ouverture du 47e Festival qui a eu lieu le 14 juillet. Rencontre avec cette belle personne,  passionnée par le chant et la musique qui a laissé son empreinte lumineuse au sein de l’abbaye.

Pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Nataliia Zhuravel et suis arrivée en France en mars 2022. En Ukraine, je travaillais comme professeur de chant et de musique à l’Institut pédagogique de Kryvyi Rih. J’ai également été coach vocal dans le secteur du théâtre durant plusieurs années.

L’Abbaye de Sylvanès fait partie d’un réseau de CCR (Centres culturels de rencontre). Pourquoi avoir choisi ce lieu plutôt qu’un autre ?
Le programme Odyssée auquel je participe a été mis en place par le Ministère de la Culture et vient spécifiquement en aide aux artistes réfugiés, ce qui explique ma présence ici à Sylvanès. La thématique du Centre culturel de rencontre autour de « Musiques et dialogue des cultures » et toutes les actions de pédagogie du chant, de création musicale qui sont menées ici m’ont motivée à postuler. Je ne regrette aucunement ce choix  ! Cela a été un véritable programme d’intégration pour moi. Le cadre de l’abbaye est favorable à l’exploration des techniques vocales que je pratique comme le yoga vocal, la respiration, la méditation, les sons de la nature. Elles visent, entre autres, à favoriser l’harmonisation des émotions. Ce fut une très belle découverte !

Quel était votre objectif de travail en venant ici ?
J’avais besoin de développer les bases et les principes de mon travail, celui-ci étant d’enseigner le chant à tous ceux qui le souhaitent car chanter peut faire une différence dans votre vie, j’en suis convaincue ! Je suis très contente de passer du temps entre ces murs et j’y rencontre des personnes merveilleuses. Je sais que beaucoup de prières ont été prononcées dans ce lieu et j’y prie tous les jours. Je veux vraiment que cet endroit m’aide à croire en la victoire de mon pays.

Le contexte de la guerre en Ukraine a cruellement affecté votre travail…
La guerre a bouleversé ma vie. Je me suis retrouvée seule en France et je me sentais très mal. J’étais souvent déprimée parce que je ne pouvais rien faire face à la situation. J’ai vécu un an dans une auberge dans la ville de Fos-sur-Mer. L’auberge était isolée, il n’y avait rien d’autre qu’un atelier de préparation de légumes à côté de chez moi et j’y suis allée pour travailler. Je suivais des cours de français trois fois par semaine. Il fallait malgré tout que je me ressaisisse parce que la vie continue. J’ai commencé à chanter avec des femmes et des enfants ukrainiens et nous avons formé ensemble le choeur de chansons ukrainiennes « Kalyna ». On chantait pour le plaisir, on répétait plusieurs fois par semaine et on est montées sur scène au théâtre de Martigues pour l’ouverture de la saison culturelle 2022 et aussi à Fos-sur-Mer. Côté famille, nous communiquons via les réseaux car les frontières sont fermées. J’ai des nouvelles de mon fils qui étudie au Conservatoire d’Odessa et qui, je l’espère, pourra venir jouer en France à l’automne 2024.

Avez-vous pu échanger avec d’autres artistes à l’Abbaye au cours de votre séjour ?
Oui j’ai pu assister dès mon arrivée au travail de Frédéric Gindraux et Jean-Philippe Clerc à l’occasion de leur classe de maître auprès de jeunes professionnels. Frédéric est comme un maître pour moi, il enseigne clairement et très subtilement  : il a une approche individuelle particulière auprès de chaque élève, ce que j’aime tout particulièrement. À ses côtés, j’ai appris de nouvelles choses et confirmé mes connaissances en matière de spécialisation vocale.

J’ai partagé également du temps auprès du Directeur général Michel Wolkowitsky, également chanteur, pédagogue de la voix et metteur en scène. Notre première rencontre autour du chant m’a aidée à retrouver un équilibre psychologique après le stress que je subissais à ce moment là : mon pays était en effet particulièrement meurtri par des violentes attaques dans un hôpital de Kyiv. Michel m’a aidée à orienter le son de ma voix dans une direction calme. Il travaille avec beaucoup de soin et de professionnalisme sur la respiration et la voix et j’ai pu me rendre compte que nos techniques vocales étaient très similaires. Cela me donne encore plus de confiance dans mon développement professionnel, car en fait il n’y a pas de limites, pas de frontières, mais seulement « sa majesté la musique » !

Au cours de mon séjour, j’ai aussi participé au stage « chanter en famille » animé par Béatrice Gaussorgues. Tout le temps passé avec elle et le groupe d’enfants, d’adolescents et parents a été un grand plaisir ! A cette occasion, j’ai pu mettre à profit les techniques que j’utilise avec les stagiaires, des exercices de respiration, des jeux vocaux, c’était très chouette ! Nous avons travaillé ensemble une chanson simple et j’ai été aussi ravi de découvrir le répertoire de musique liturgique, si spécifique au lieu. Il y avait une ambiance conviviale, c’était comme des vacances  !

Avant mon départ, j’ai aussi pu rencontrer les merveilleux musiciens de l’ensemble les Paladins et assister au très beau concert de musique baroque d’ouverture du Festival.

J’ai vraiment apprécié toutes les personnes qui travaillent à Sylvanès pour leur respect, leur aide, leur délicatesse, leur générosité, pour la gourmandise, pour le calme qu’ils créent au sein de l’abbaye. Merci à tous !

Sur quel projet travaillez-vous actuellement ?
A présent, j’habite Martigues où j’enseigne en tant que cheffe de chœur et professeure de chant. Parmi mes derniers projets en date, j’avais dans l’idée de faire se rencontrer la chorale d’enfants que j’anime à Kryvyi Rih et d’autres chorales d’Ukraine et de France. Pour cela, j’ai mis en place un festival en ligne et j’ai rencontré des chefs de chœur de différentes villes. L’UNESCO nous a rejoint dans le projet pour nous apporter son soutien. La chorale de Kryvyi Rih devrait venir en représentation dans une église de Martigues le jour de la Saint Nicolas en décembre 2024.

Le mot de la fin ?
Chantez, vous le valez bien ! Le chant a un effet harmonieux et global sur le développement de l’individu, il favorise la communication, la socialisation, les amitiés réelles et la camaraderie !  Alors quelque soit votre âge, quelque soit votre état, chantez  !!!

 

Propos recueillis par Vanessa Brisse-Bonnet, saisonnière au service accueil-tourisme de l’abbaye, juillet 2024

Pons de Léras, un convers pas comme les autres…

On l’a vu précédemment, Pons de Léras, après s’être repenti de ses actes de violence, se tourne vers une carrière de religieux en ce début de XIIe siècle. En 1132, partant de son ermitage de Sainte Marie du Théron, dans l’actuelle vallée de Sylvanès, sur la rive Sud du Cabot, il s’en va vers l’abbaye cistercienne de Mazan située à plusieurs jours de marche au Nord-Est. Là-bas, il va se former à une vie monastique exigeante et très réglementée, mais qui laisse la place à des profils très divers. Cette place au sein de l’ordre de Cîteaux, Pons la trouve parmi les frères convers.

Mais… C’est quoi un frère convers !?
Le statut de frère convers n’est pas une invention cistercienne. Avant le XIIe siècle, dans d’autres ordres religieux, chez les clunisiens par exemple, les convers sont des adultes choisissant de prononcer leurs vœux monastiques et de se mettre au service d’une communauté religieuse. Ils ont connu une vie de laïc qui leur confère, en général, une certaine appétence pour les travaux physiques, dont les moines prieurs sont assez peu friands. Entre autres, ils défrichent, labourent et cultivent des domaines monastiques encore relativement restreints. Souvent, ces convers sont issus de la classe laborieuse, subordonnée au clergé et à la noblesse durant l’époque médiévale. En prenant l’habit religieux, ils espèrent trouver une vie plus paisible au sein d’un monastère, sans pour autant s’élever socialement. Cependant, les places sont rares. Cîteaux change la donne.

Essai de reconstitution des vêtements monastiques : à droite, les moines tonsurés portent une tunique et un scapulaire; à gauche, les convers, hirsutes et barbus, sont vêtus d’une tunique avec scapulaire et capuchon.
Illustration © Denis Poughon, extrait du livre “Vivre dans une abbaye” de Jean-Baptiste Lefèvre

Quoi de neuf pour les convers cisterciens ?
Alors que les cisterciens commencent à essaimer, en fondant de nouvelles abbayes, Étienne Harding, abbé de Cîteaux, commence en 1119 la rédaction de la Charte de charité. Ce document, constitutif de l’Ordre, apporte, entre autres, des précisions sur l’organisation économique cistercienne. On y apprend que les moines doivent exploiter directement l’entièreté de leurs domaines, en refusant le système de la tenure qui fragilise les possessions monastiques.  Or, les domaines cisterciens sont vastes, et les moines doivent se consacrer en priorité à la prière. Les convers, main-d’œuvre gratuite, deviennent alors essentiels. Pour preuve, au XIIe siècle, ils constituent les deux tiers de la population des abbayes affiliées à Cîteaux. On trouve parmi eux des hommes et des femmes issus d’origines sociales variées (ce qui est exceptionnel pour cette époque), soucieux du Salut de leur âme et, pour certains, convaincus par les mots de Bernard de Clairvaux : « Travailler, c’est prier ». Les granges monastiques, parfois éloignées des monastères, font partie de leurs lieux de vie. C’est depuis ces granges qu’ils se chargent du commerce des éventuels excédents de production.

Légende, les frères convers (à gauche) s’occupent du travail manuel tandis que les moines (à droite) prient. Source: enluminure extraite du Commentaire sur l’Apocalypse avec Interpolations d’Alexandre de Brême (fin XIIIe siècle)

 

Et Pons de l’Héras dans tout ça ?
On pourrait voir ces convers comme des religieux « de seconde zone », ne portant même pas le nom de moine, si des cas comme Pons de Léras n’existaient pas. Loin d’être devenu un humble laboureur au service de la communauté monastique, l’ancien chevalier est cité comme témoin dans plusieurs actes de donations faites à l’abbaye de Sylvanès. Il semble donc rester à la manœuvre dans l’accroissement du domaine monastique même après la transformation de son ermitage en monastère cistercien en 1136, dont il n’est théoriquement plus le chef. Ces éléments peuvent créer un doute sur son statut de convers, ou au moins sur le laps de temps durant lequel il le fut. Mettons cela sur le compte d’une période où l’organisation cistercienne est encore balbutiante, en particulier à Sylvanès, au tournant des années 1140. A ce moment, les convers paraissent bénéficier de davantage de responsabilités, pour le bonheur d’anciens seigneurs comme Pons de Léras. En 1188, l’Ordre cistercien finit par interdire au membre de la noblesse de devenir convers, cantonnant pour de bon ces frères à une place inférieure.

 

 

Qui était Pons de Léras, fondateur de l’abbaye ?

Si vous êtes déjà venu à l’abbaye de Sylvanès, vous avez probablement entendu parler de Pons de Léras. Mais si, vous savez… Ce guerrier ayant vécu au début du XIIe siècle qui, soudain, par miracle, après moultes actes de pénitence, se trouve une vocation de moine. Cette histoire peut vous émouvoir, ou vous faire rire, selon votre sensibilité. Elle vous fait d’autant plus réagir qu’on la raconte souvent en lui ajoutant quelques légendes locales, qui grossissent autant les défauts que les qualités de Pons de Léras, faisant de lui un personnage haut en couleurs, un bandit de grand chemin trouvant le Salut en donnant sa vie à Dieu !

Pons de Léras, seigneur du Pas de l’Escalette

Le portrait dressé par le seul document ayant une valeur historique à ce sujet, la chronique de la fondation de l’abbaye de Sylvanès écrite par le frère Hugues, qui rédige une vingtaine d’années seulement après le décès de Pons, en se basant sur les témoignages de personnes l’ayant côtoyé, présente d’abord l’individu comme un seigneur châtelain finalement assez banal pour son époque. Quoi de plus normal en effet, dans le Sud-Ouest du Royaume de France, où petites et grandes seigneuries rejettent encore en grande partie l’autorité du roi et de l’Église, au profit de jeux de pouvoir incessants, qu’un homme d’arme possédant un château fort, comme Pons, se montre « importun à beaucoup de ses voisins » et use de « violence armée ». Également, dans un contexte où les autorités ecclésiastiques, poussées par la réforme grégorienne, assoient de plus en plus leur domination morale, notre homme ne pouvait que finir par se soumettre à « la crainte de Dieu ». Ils sont nombreux à avoir choisi, ou à s’être vu imposer, cette voie au XIIe siècle.

Pons de Léras en patrouille au Pas de l’Escalette vers 1110 (ou plutôt l’image que l’on s’en fait si l’on prend trop au sérieux ce que raconte le guide!)

Le choix de Cîteaux

Ce qui rend son histoire exceptionnelle, et précieuse pour les historiens, c’est sa décision de rattacher l’ermitage, nouvellement fondé, à l’ordre de Cîteaux dans les années 1130. En effet les sources au sujet de cette méthode d’incorporation d’une communauté préexistante à l’Ordre sont assez rares, surtout pour cette période. De plus, comme le précise son chroniqueur, Pons de Léras préfère devenir simple frère convers en rejoignant les cisterciens. Est-ce une nouvelle marque d’humilité ? Ou une manière de ne pas être astreint à la rigueur de la Règle, en s’occupant plutôt du domaine de l’abbaye ? Probablement un peu des deux selon le consensus trouvé par les chercheurs. Un moyen de continuer d’utiliser ses compétences en matière de gestion de domaine et des ressources, dont on l’accusait d’abuser par le passé, non plus pour ses intérêts propres, mais pour le bien d’une communauté monastique, d’un ordre religieux et, par extension, pour la gloire de Dieu.

Pons de Léras en pénitence à Lodève vers 1120 (extrait d’un tableau exposé à la mairie de St Félix de Léras, auteur et date inconnus)

Un ordre attractif

C’est grâce à cette opportunité laissée à l’ensemble de la population de prendre l’habit religieux sans être contraint à une vie de réclusion, via ce statut particulier de convers, qui demande tout de même de prononcer ses vœux monastiques de pauvreté, d’obéissance et de chasteté, que l’ordre cistercien attire un grands nombre de vocations depuis toutes les classes sociales. De cette manière, l’Ordre bénéficie d’un large panel de savoir-faire, tant en matière de travail manuel que de gestion du territoire. L’histoire de Pons de Léras, racontée avec soin par le copiste Hugues Francigena, nous rappelle indirectement que cette originalité est la source du succès des Cisterciens en ce début de XIIe siècle. A l’inverse, au siècle suivant, la diminution du nombre de frères convers entraîne la perte d’influence de l’Ordre.

Introduction de la chronique de fondation de l’abbaye de Sylvanès par le frère Hugues Francigena

Thomas Pouget en résidence à Sylvanès

Cinq questions à Thomas Pouget, artiste en résidence à l’Abbaye de Sylvanès

Peux-tu te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas ?
Je m’appelle Thomas Pouget, je suis metteur en scène et comédien. Je dirige en Lozère une compagnie professionnelle de théâtre qui s’appelle La Joie Errante. Nous créons des spectacles sur des thématiques variées (agriculture, passage de l’enfance à l’adolescence, classes moyennes, …) et d’autre part, nous menons des actions de territoire (résidences, stages, lectures, création de festival) avec un objectif commun : s’émouvoir et réfléchir ensemble autour de questions universelles. 

En janvier 2024, tu as débuté une résidence de territoire à l’abbaye de Sylvanès, en quoi consiste-t-elle ?
Cette résidence, c’est l’occasion de rencontrer les habitants qui font le paysage local, en partant du principe que tout le monde a une histoire à raconter et qu’il y a systématiquement de la complexité dans chacune. Au fur et à mesure de ces rencontres, il y a un puzzle qui se complète, un tableau qui se dessine sur ce qu’est le territoire, et sur les gens qui y habitent. Des thématiques se dégagent, des perceptions tantôt semblables, tantôt contradictoires et l’objectif final étant que les gens du pays s’emparent de ces témoignages qui m’ont été confiés afin de révéler un portrait de leur village.
En somme, on crée une matière théâtrale à partir de témoignages, interviews, anecdotes, tout comme on a l’habitude de le faire pour nos spectacles. Mais que les futurs participants se rassurent, pas forcément besoin d’apprendre du texte ou d’avoir fait du théâtre pour faire partie de la restitution finale.

 

Le 17 mars prochain, tu invites le public local à une lecture publique à l’abbaye. Peux-tu nous en dire plus sur cette rencontre?
Les lectures, elles sont à mon sens indispensables dans une démarche de résidence territoriale. Souvent considérées comme le parent pauvre du théâtre, elles sont plus qu’une simple lecture. Elles sont vivantes. C’est l’occasion de découvrir des auteurs sur des thématiques, et notamment pour cet événement du 17, des auteurs qui ont écrit sur la campagne. Celle d’hier et celle d’aujourd’hui.
Aussi, les spectateurs pourront entendre par exemple du Daudet avec Les lettres de mon Moulin, des Fables de la Fontaine et d’autres surprises. C’est partir à la rencontre d’écritures différentes, mais autour d’un sujet commun.

Ta compagnie de théâtre s’appelle la Joie Errante : pourquoi ce nom et qu’est-ce qu’il symbolise pour toi ?
C’est toujours assez délicat de choisir le nom d’une compagnie et ça serait intéressant de savoir ce que ce nom évoque chez les spectateurs. Pour ma part, ce nom est à la fois un mantra, et une conviction. Ne jamais oublier la Joie qui nous anime, qui nous pousse à savourer ce que nous faisons, et faire en sorte qu’elle puisse être partout.

La lecture de ta pièce « Vacarmes » est elle toujours prévue au prochain Salon de l’agriculture ? Si oui, avec quel état d’esprit vas tu t’y rendre ?
Elle l’est toujours. Le 25 et 26 février, à 11 h, sur le stand d’Eliance et celui du département de la Lozère. Avec tout ce qui se passe actuellement, ça va être très intéressant d’y être. Cela fait un moment qu’à l’issue des représentations, on entend des spectateurs nous dire  » vous devriez aller le jouer au salon votre spectacle « , cette fois, c’est pour de bon  !
J’ai envie de penser que ça n’est que le début, que d’y aller n’est qu’un prémisse à quelque chose de plus grand. Donc oui, j’y vais avec une envie certaine d’en démordre et la certitude que ce texte doit être entendu, par tous et toutes, sur ce que c’est que d’être paysan. 

 

Thomas Pouget reviendra en résidence à Sylvanès du 28 avril au 3 mai et en novembre 2024.

Lecture publique le 17 mars à 16h dans le scriptorium de l’abbaye – participation libre 

 

 

Pierre Vallet : de New-York à Sylvanès

Le pianiste et chef d’orchestre Pierre Vallet est un invité régulier des plus grandes maisons d’opéra, comme le MET Opéra de New-York ou encore The Juilliard Scholl of music. Depuis déjà trois saisons, il rejoint l’abbaye pour co-animer avec Michel Wolkowitsky une classe de maître à destination de chanteurs professionnels. Rencontre…

Pouvez-vous nous raconter ce qui vous a amené à enseigner à Sylvanès ?
Le hasard d’une rencontre. Pour la petite histoire, Michel Wolkowitsky et moi avons étudié avec le même professeur de chant à Paris il y bien des années. Par l’entremise d’une amie commune, nous nous sommes retrouvés en 2021 et Michel m’a invité à encadrer une première classe de maître avec lui.

Que vous inspire ce lieu de travail ?
Le lieu est magique. Je suis tombé en extase devant cette abbaye.
Ma collaboration avec Michel est une parfaite osmose. Je m’aligne complètement avec son enseignement de la voix et nous nous complétons sur un plan artistique.

Que souhaitez-vous transmettre en priorité à un(e) jeune artiste lyrique lors de vos masterclass? 
Le courage d’une interprétation authentique tout en s’inspirant de tous les paramètres musicaux. Je travaille sur la scène internationale et je peux communiquer à ces artistes ce que l’on attend d’eux professionnellement.

Au cours de votre carrière musicale, quelle est la rencontre qui vous a le plus marqué ?
Ma collaboration avec Seiji Ozawa. Nous avons travaillé ensemble sur 49 productions d’opéras dans le monde entier. Il a transformé mon approche de la musique et m’a donné les bases fondamentales de la direction d’orchestre.

Quelle partition emmèneriez-vous sur une île déserte ?
Difficile de répondre à cette question. Mais ce que me vient maintenant c’est l’Eroica de Beethoven.

Site internet de l’artiste  : https://www.pierrevallet.net/

 

Témoignages de stagiaires
Au sein de cette classe de maître, je trouve l’exigence et la précision alliées à la bienveillance. La pédagogie de Michel est parfaitement complétée par l’expérience apportée par Pierre, notamment au niveau de l’interprétation. Pierre a beau côtoyer les plus grands chanteurs, il sait apporter à chacun sa singularité, sans distinction ! Cécile Veyrat

Dans ce lieu magique et ressourçant, j’ai pu bénéficier pleinement des compétences de Pierre et Michel dans le répertoire et la technique vocale. Par leur expérience et leur partage, j’ai pu approfondir mes compétences et ma maîtrise vocale. Jean-Christophe Fillol

J’ai eu la chance de participer à cette formidable masterclass. Leur dynamisme, leur exigence et leur extrême bienveillance ont été un réel vecteur de progression pour moi. Je recommande absolument ! Emmanuelle Demuyter

L’artiste Wang Yong en résidence à l’abbaye

Dans le cadre d’une résidence artistique coordonnée par l’ACCR, l’abbaye accueille depuis le 28 août Wang Yong, un artiste peintre chinois de 31 ans. Jusqu’au 4 septembre, il profite de cette résidence pour explorer l’intime, à partir de ses rêves et de ses émotions, dans un cadre très différent de celui qu’il a connu jusqu’à présent, en se confrontant à des paysages nouveaux et aux sites historiques occidentaux anciens des Centres culturels de rencontre français. Il a échangé avec nous sur son séjour à Sylvanès.

Peux-tu te présenter et nous parler de ton projet artistique ici à l’abbaye ?
W : Je m’appelle Wang Yong, j’ai 31 ans et je suis peintre. Je suis devenu fasciné par la peinture à l’âge de 7 ans lorsque j’ai découvert l’illustration du roman « au bord de l’eau », l’un des quatre plus célèbres romans classiques chinois. En copiant ces dessins j’ai pu développer mes premières techniques de peinture. Ensuite au collège j’ai intégré une formation périscolaire du dessin et de la gouache, où j’ai pu explorer des nouveaux sujets. En 2010, j’ai été admis à l’Institut d’art de Nanjing, où j’ai commencé des formations professionnelles sur la gravure et la peinture à l’huile, et j’ai choisi la peinture en cuivre comme domaine d’art principal. Ici j’ai utilisé de la peinture acrylique pour créer un paysage de Camarès. La raison pour laquelle j’utilise autant de rose est que cette petite ville du sud de la France me donne une telle impression, tant les gens que le paysage sont beaux et charmants.

Comment pourrais-tu décrire ton art en quelques mots ?
W : Mon concept artistique est ma vie, je veux sentir ma vie, enregistrer la vie, j’aime dessiner les scènes intéressantes et belles de la vie, parce que je veux atteindre l’objectif de capturer la beauté, ce qui me pousse à chercher la beauté au quotidien. D’autre part, j’aime beaucoup la création imaginative, où des scènes imaginaires sont combinées à la réalité pour créer des images intéressantes et narratives, qui sont généralement exprimées dans mes gravures.

Qu’est ce qui t’as amené à Sylvanès ?
W : J’ai participé au programme de résidence artistique de l’ACCR il y a trois ans. Lorsque je travaillais, j’étais membre de l’ACCR en Chine. Bien que le processus ait été très compliqué (à cause de la pandémie), nous n’avons pas abandonné, le destin m’a permis d’être ici aujourd’hui, et j’en suis très reconnaissant.

Comment se passe ton séjour ici, quelles sont tes impressions de l’abbaye ?
W : J’aime beaucoup cet endroit, en pleine nature, plein d’histoire et d’art, j’aime aussi la nourriture, je suis très heureux d’être venu à Sylvanès, où le calme me permet d’être plus créatif et de mieux réfléchir.
Je trouve l’abbaye très sacrée, le sens de l’histoire apporté par le bâtiment en pierre est solennel, et lorsque je pénètre dans le vieux bâtiment, c’est effectivement très solennel. Mais cela ne me dérange pas, je ne sais pas pourquoi, peut-être parce que les gens ici sont détendus, dans le scriptorium, de jeunes chanteurs pratiquent le chant lyrique,
le soleil brille à travers les fenêtres voûtées, j’ai commencé à imaginer des moines en train de créer des chants.

As-tu eu l’occasion d’assister à quelques concerts, écouter de la musique ?
W : C’est la première fois que je visite une abbaye, j’ai vu de nombreux musiciens s’exercer au chant, et j’ai pensé que ce devait être une expérience sacrée et merveilleuse que d’assister à un concert classique dans une vieille abbaye fondée au 12e siècle.

As-tu fait de belles rencontres ?
W : Bien que mon séjour en France soit court, j’ai rencontré beaucoup de personnes et de choses intéressantes. Je vais vous raconter ma plus belle rencontre. L’autre jour, je me promenais dans la petite ville de Camarès, prenant des photos en marchant, lorsqu’une porte s’est ouverte dans la rue, un homme est sorti et m’a demandé ce que je faisais. Puis il m’a invité à prendre des photos sur le balcon où la vue était si belle, pour être honnête, j’ai commencé à avoir un peu peur, et j’ai réfléchi un moment, mais je l’ai quand même suivi jusqu’au balcon. J’ai effectivement eu une vue magnifique, puis il m’a invité à prendre un café, et j’ai appris que ce n’était pas sa maison, c’était un décorateur d’une autre ville qui travaillait ici pour une semaine. Nous avons parlé de beaucoup de choses, de la vie, l’idéal, le mariage et ainsi de suite. Comme mon anglais était médiocre et que le sien était encore pire, nous avons utilisé un logiciel de traduction pour communiquer. Cela n’aurait jamais pu m’arriver en Chine.

 

Propos recueillis par Loane, stagiaire au service communication